2002

Découverte de trois tombes exceptionnelles du VIe siècle.

Lors de la fouille d’un habitat alto-médiéval en 2002 par Marie-Cécile Truc, archéologue de l’Inrap (successeur de l’Afan), sur le site de la Tuilerie (à 200 mètres des Crassées), trois tombes de chefs francs de l’époque mérovingienne furent découvertes.

Les fouilles de la Tuilerie (Chêne Saint-Amand) en 2002. ©DR

La première sépulture était celle d’une jeune fille richement parée (deux paires de fibules cloisonnées en argent, collier de perles en ambre, bracelet, bague en or…). Sur son cercueil étaient déposés une céramique, deux verreries, ainsi qu’un bassin en bronze.

Une tombe d’élite au Chêne Saint-Amand (2002). ©DR

La seconde sépulture était constituée d’une chambre funéraire à l’intérieure de laquelle un homme d’une trentaine d’années était déposé dans un cercueil. Il était accompagné de ses affaires personnelles (peigne en os, bague en or, aumônière en matières précieuses, boucle de ceinture en cristal de roche…) ainsi que de son armement (épée, hache, bouclier, lance…). Dans sa chambre avaient été déposés des objets de vaisselle en verre et en bronze et les armes les plus volumineuses (lance et angon). La dernière sépulture concernait un homme mature lui aussi inhumé dans une chambre funéraire avec son armement, une aumônière, des verreries et de la vaisselle de bronze (seau, bassin).

Une tombe d’élite au Chêne Saint-Amand (2002). ©DR

Ces tombes aristocratiques sont d’une richesse exceptionnelle tant par le nombre des objets déposés que par leur qualité. Ils témoignent de la présence d’une élite Franque à Saint-Dizier au début du VIe siècle.

Une tombe d’élite au Chêne Saint-Amand (2002). ©DR

Entretien avec Marie-Cécile Truc, Archéologue de l’INRAP

Il s’est très vite avéré qu’il s’agissait de trois tombes du VIe siècle d’une richesse tout à fait exceptionnelle.

En 2002, l’INRAP m’a confié la direction d’une fouille préventive à côté de la zone commerciale du Chêne saint-Amand.

Jeune débutante dans la région, on m’avait assuré qu’il s’agissait d’un petit site qui me permettrait de faire tranquillement mes premières armes en archéologie mérovingienne. En effet, les résultats du diagnostic mené l’année précédente laissaient présager la présence de quelques vestiges d’un village : un ou deux bâtiments, quelques fonds de cabanes, peut-être un four domestique.

Si, sur ce point là, la fouille a livré les résultats attendus, en revanche, une surprise de taille m’attendait !

Dès le premier jour de décapage, j’ai découvert le socle d’un bassin en bronze. Il s’agissait visiblement d’un objet funéraire et je pensais alors trouver une tombe avec peut-être un peu de matériel. A la fin du décapage nous avions en effet mis au jour trois fosses adjacentes, laissant présager la présence d’un petit groupe funéraire.

Mais à peine quelques minutes après avoir commencé à fouiller la première tombe, c’est une, deux, puis quatre fibules en argent et grenats, une bague en or et des dizaines de perles qui sont sorties de terre.

J’ai alors compris que nous étions face à une sépulture d’une grande richesse et que les deux autres devaient être de la même grandeur.

A partir de là, tout s’est accéléré : chaque jour, nous trouvions de nouveaux objets et il s’est très vite avéré qu’il s’agissait de trois tombes du VIe siècle d’une richesse tout à fait exceptionnelle.

Aménageur (DDE Haute-Marne), services de l’Etat (DRAC et SRA Champagne-Ardenne), mairie de Saint-Dizier et INRAP se sont alors rapidement concertés pour permettre la poursuite de la fouille dans les meilleurs conditions possibles : des spécialistes (anthropologues, restaurateurs, photographes) ont été dépêchés sur le site et un système de gardiennage a été mis en place par la DDE.

La conduite de la fouille a été rendue difficile par des conditions climatiques désastreuses : trente centimètres de glace en janvier et pluies torrentielles tout le mois de février. Les derniers objets ont été prélevés sur le week-end, profitant d’une petite accalmie dans les pluies. Par ailleurs, la pression médiatique et les visites incessantes sur le terrain ne nous aidaient pas à nous concentrer sur notre tâche. Mais l’opération a tout de même été menée à terme et les dégâts limités, notamment grâce à l’investissement de l’équipe.

Ce fut la fouille la plus éprouvante que j’ai eu à mener, mais depuis, j’ai été largement récompensée par le bonheur d’étudier et de faire connaître au public ces objets qui sont loin d’avoir livré leur secrets, puisque 10 ans plus tard, l’aventure continue et des spécialistes travaillent toujours dessus.

Dans les années quatre-vingt-dix, alors étudiante en allemand, je me suis passionnée pour l’archéologie mérovingienne, notamment en consultant des ouvrages qui présentaient de magnifiques trésors mérovingiens mis au jour en Europe du nord.

Si j’avais su, lorsque j’ai décidé de changer de cursus universitaire pour devenir archéologue, qu’un jour, moi aussi, j’aurais la chance de faire une découverte qui figure maintenant dans ces mêmes livres…